Archives de la catégorie Tricot activisme

Paix

Le pardon est là précisément pour pardonner ce que nulle excuse ne saurait excuser. Il est fait pour les cas désespérés ou incurables.  ~Vladimir Jankélévitch

Le pardon est un thème prédominant en ce début d’année mouvementé. Une semaine après l’attentat meurtrier du 7 janvier 2015, le journal satirique Charlie Hebdo publie à nouveau une caricature du Prophète Mahomet, cette fois avec l’inscription « Tout est pardonné. » Une image improbable. On pardonne tout d’abord pour soi, pour se libérer, pour ne pas sombrer dans la folie, pour dompter l’impardonnable, pour contrer la haine. Pardonner, c’est aller dans le sens de la paix. Comme l’écrit si bien Marianne Williamson dans son livre Un Retour à l’Amour : « Le pardon est pareil à un art martial de la conscience. Dans l’Aïkido et dans d’autres arts martiaux, on esquive la force de l’assaillant plutôt que d’y résister. L’énergie de l’attaque se retourne alors comme un boomerang contre l’assaillant. Notre force consiste à ne pas réagir. Le pardon procède de la même façon. Quand nous contre-attaquons – et la défense est une forme d’attaque – nous prenons l’initiative d’une guerre que personne ne peut gagner. Comme le manque d’amour n’est pas réel, il ne nous affecte pas, ni nous-mêmes ni les autres. Le problème, bien sûr, est que nous pensons qu’il nous affecte. En cherchant un miracle, nous cessons de participer aux batailles de la vie. »

Après 3 années d’activités intenses, lufoques et joyeuses, le collectif Les Ville-Laines tire sa révérence. Ce fût un privilège de faire partie de cette aventure. Inspirées par l’essor du yarnbombing, cinq femmes se sont unies afin de se réapproprier la rue et d’inviter les gens à retisser le lien social. Tout cela dans un but commun de créer un espace utopique où le bonheur se mesure au toucher et non au compte en banque. Comme dans tout élan idéaliste, l’actualisation des potentialités humaines exigent parfois que les chemins se séparent. L’énergie spontanée qui a alimenté le collectif se redéploie ainsi, désireuse de se réactualiser et de conquérir de nouveaux horizons; loin de perdre de la vitesse, elle se dynamise. Ce que j’ai appris et partagé durant ces années continuera à m’habiter longtemps. Transmuter, telle est la force du collectif.

Champs des PossiblesChamps des PossiblesL’argent ne fait pas le bonheur, tricot-graffitis du collectif Les Ville-Laines, Champs des Possibles, Mile-End, Montréal, Novembre 2014

La beauté plaît aux yeux, la douceur charme l’âme. ~Voltaire

La laine réconforte. Sa texture si fine et agréable au touché inspire la délicatesse. Le temps qui file, entre nos doigts, tel un murmure, est en fait infinie bonté. La douceur tisse des liens, rapproche les gens. Elle est mutuelle. Elle suppose une vulnérabilité mais aussi une offrandre. C’est un cadeau, un acte de civilité. Comme la laine, la douceur unifie.

Merinos

NINOO, une association française dévouée aux enfants autistes, fait appel à la population pour tricoter des cœurs bleus qui seront distribués le 2 avril 2015. Plus d’information ici.

Coeur bleu

Mile-EndMile-EndMile-End

Il n’existe rien de constant si ce n’est le changement. ~Bouddha

La vie est changement. L’impermanence, l’une des doctrines du bouddhisme, exprime bien cette notion que l’existence est, sans exception, transitoire et dans un état constant de flux. Le passage des saisons est une belle métaphore qui représente ce mouvement, d’un début et d’une fin. L’absence de permanence peut se révéler difficile à accepter ou bénéfique tout dépendent comment elle est vécue. Toute fin est aussi une opportunité renouvelée de revoir, recommencer et revivre. L’acceptation des choses telles quelles sont devient alors un mantra. Une façon d’aborder cette grande aventure qu’est le changement perpétuel.

TextlesMile End

Le 3 octobre depuis 1990 a lieu le Jour de l’Unité allemande qui célèbre la réunification du pays. Le mur de Berlin a divisé la ville durant plus de 28 ans (1961-1989). Au centre de la guerre froide, période durant laquelle deux idéologies dominantes s’affrontent, le « mur de la honte » pour les uns et le « mur de protection antifasciste » pour les autres, il a été l’emblème de la guerre froide. Le 9 novembre prochain aura lieu le 25e anniversaire de sa chute.  « En plus de représenter un bouleversement majeur dans les sphères économiques et politiques du monde, la chute du mur de Belin incarne une victoire pour les droits de la personne. C’est un symbole qui continue d’inspirer des milliers de militants en quête de liberté et de démocratie » rappelle Daniel Casillas dans un article publié dans le Métro ici. En mémoire de ceux et celles qui ont perdu leur vie en tentant de fuir à l’Ouest ou qui ont été emprisonné sous la dictature autoritaire de l’Est, j’ai osé une petite « touche de douceur » à Bernauer Strasse.

Berlin Berlin

Berlin Wall

Le monde avec lenteur marche vers la sagesse.  ~Voltaire

Sagesse

Si vous avez de la laine à donner, je vous encourage à faire un don aux soeurs du Relais Sagesse qui tricotent depuis plusieurs années pour la cause des sans abri. Les vêtements sont ensuite remis à l’organisme Médecins aux pieds nus Canada qui les distribue aux itinérants de Montréal et lors de missions en Haiti. Contact pour les dons : 514-374-7830 / rachel85@videotron.ca (soeur Rachel). Merci et bon tricot!

Wool Against WeaponsLe tricot militant est rassembleur. La laine unie. C’est bien connu. Sa plus grande force, sa caractéristique principale, c’est son pouvoir de rallier les gens pour une cause tout en utilisant le médium de la douceur comme message.

Le 9 août dernier à l’occasion du 69e anniversaire du bombardement de Nagasaki, des milliers de personnes ont rejoint le groupe Wool Against Weapons et d’autres organisations anti-armements dans le Berkshire en Angleterre afin de dérouler un foulard de la paix. Le tricot rose qui a pris plus de 18 mois à confectionner et impliqué un nombre considérable d’artisans et des militants de la paix de partout dans le monde s’est étendu sur plus de 12 kilomètres. Cette action de grande envergure, créative et inspirante avait comme objectif de mettre en lumière la folie du nucléaire en reliant l’écharpe de la paix entre Aldermaston et Burghfield, deux installations qui conçoivent et produisent des ogives pour le système d’armes nucléaires de la Grande-Bretagne. Le gouvernement britannique dépense présentement £100 milliards sur la construction d’un nouveau système d’armes nucléaires pour remplacer le missile Trident. Une somme considérable qui pourrait servir à d’autres fins dont l’éducation. En tant que symbole, le foulard rose représente un désir de changement profond, soit la confection d’un monde de paix et d’amour, sans arme et sans frontière. La couleur qui connote le féminin, la douceur et l’enfance détonne avec l’univers macho du militarisme.

La manifestation aura aussi servit à honorer les personnes tuées par les technologies nucléaires inhumaines qui ont fait tant de ravages au Japon lors de la 2e guerre mondiale et dont la prolifération depuis continue à jeter une ombre sur l’avenir de l’humanité et sa qualité de vie. Pendant les mois qui ont précédé l’action, les gens ont tricoté en public afin de susciter des discussions sur cet enjeu de taille. Le tricot permettant d’aborder des sujets complexes et difficiles tout en ayant du plaisir à se rassembler et à échanger a permis à la population de s’unir. Après le rassemblement, l’écharpe a été transformé en couvertures et distribué aux sans-abri, à des soins palliatifs, dans des camps de réfugiés et zones de conflits à l’étranger. Opposer la force de création, d’unicité et d’entraide propre au tricot à la force destructive du nucléaire est à la fois audacieux et apte. Le militantisme laineux, comme cet exemple le démontre bien, est une démonstration de l’énergie positive, constructive et collective qui nous rappelle qu’un monde de paix n’est pas impossible mais en train de s’actualiser.

Wool Against Weapons

Wool against weaponsImages: Wool Against Weapons

OlekLe dernier coup d’éclat d’Olek crée des remous et pose de très bonnes questions sur les valeurs entourant la pratique du tricot-graffiti. En voulant attirer l’attention sur la menace d’extinction des requins en recouvrant une sculpture du musée sous-marin de Cancun, l’artiste aurait par mégarde endommagé la faune aquatique selon un article récent du Huffington Post. Agir sans permission est le propre du graffiti. C’est une façon de laisser sa marque et se réapproprier l’espace public. C’est audacieux et souvent déroutant, voire confrontant. La laine confère tout de même un aspect doux et acceptable à ces actions illégales. D’autant plus que le textile, de par sa nature, connote la protection et non la destruction. La bombe aurait très bien pu réussir à secouer les consciences en matière de protection de l’environnement. Au lieu son détonnement semble s’être noyé dans une conjoncture entourant la légitimité morale et le bien fondé de sa démarche. Une oeuvre ou même un geste artistique appuyant une cause sociale se doit d’être avisée et hautement éthique afin de garantir son succès et préserver l’intégrité du message. Olek qui est loin d’être une amateur aurait pu prévoir le coup. Dans ce cas de figure, la bombe à retardement, et le véritable danger, c’est de vouloir à tout prix repousser les limites, en mettre plein la vue, au prix de m’éprendre ses intérêts pour la cause. Le dernier billet de Leanne Prain, auteure et experte de la culture DYI et craft, intitulé On Yarn Bombing and Ethics, qui m’a inspiré cette brève réflexion, traite de quelques-uns des aspects importants entourant la pratique du tricot-graffiti. Matière à réflexion.